«Le Soleil était tombé sur Terre» — le récit d’un survivant du bombardement d’Hiroshima

Contexte historique du Japon en 1945

À l’été 1945, après la déclaration de paix en Europe, le Japon restait la seule puissance de l’Axe encore en guerre. Dans les îles japonaises, soumises à un blocus, les réserves alimentaires s’amenuisaient et étaient prioritairement destinées aux soldats. L’empereur Hirohito exhortait les civils, souffrant de la faim, à se préparer à une invasion imminente des forces alliées et à être prêts à sacrifier leur vie dans la bataille décisive qui déterminerait le sort du Japon.

Hiroshima : une ville épargnée temporairement

Une campagne de bombardements incendiaires nocturnes menée par les États-Unis avait réduit en cendres la plupart des villes japonaises, à l’exception de quelques-unes, dont Hiroshima. Cette ville, un centre régional de transport et de fabrication, avait échappé à la destruction, ce que beaucoup de ses 250 000 habitants attribuaient à une intervention divine. Cependant, des rumeurs pessimistes circulaient, suggérant que cette chance était temporaire et que le gouvernement américain réservait quelque chose de bien pire pour Hiroshima.

Préparatifs pour l’inévitable

Les autorités locales ne voulaient pas laisser le sort de la ville au hasard. Fin juillet, la garnison d’Hiroshima ordonna un effort municipal massif pour dégager des zones destinées à servir de coupe-feu dans le centre-ville, en prévision des incendies attendus lors des bombardements américains. Cela impliquait de démolir des maisons et des magasins en bois le long des artères principales et autour des bâtiments militaires et gouvernementaux clés.

Mobilisation des civils et des enfants

Environ 20 000 volontaires civils, principalement des agriculteurs, des hommes trop âgés pour le service militaire et des membres d’associations patriotiques féminines, participaient à cet effort. Ils étaient rejoints par des enfants de 12 et 13 ans, qui avaient été jugés trop jeunes pour travailler dans les usines d’armement et d’aviation, mais qui étaient désormais considérés comme une main-d’œuvre précieuse.

Le matin du 6 août 1945

Le matin du lundi 6 août 1945, les rues du centre d’Hiroshima résonnaient des chants des élèves du secondaire travaillant aux côtés des adultes sur les coupe-feu. Dans le quartier de Zakoba, environ 300 élèves de première année du prestigieux lycée préfectoral de Hiroshima aidaient à dégager les structures en bois autour de l’hôtel de ville. Ce jour-là, cependant, un garçon, Ōiwa Kōhei, ne se rendit pas au travail en raison d’un mal de ventre.

L’attaque inattendue

Peu avant 8h15, des postes d’observation signalèrent l’approche de deux avions non identifiés à haute altitude. Bien que cela n’ait pas semblé alarmant, les sirènes d’alerte aérienne ne furent pas activées, car l’officier de service était absent de son poste. À 8h14, l’un des avions plongea brusquement, effectua un demi-tour et s’éloigna à pleine vitesse. Les habitants, alertés par le bruit des moteurs, levèrent les yeux et virent trois parachutes blancs, pensant qu’il s’agissait de membres d’équipage américains sautant d’un avion en difficulté.

L’explosion de Little Boy

Peu de gens remarquèrent le cylindre gris, appelé Little Boy, qui tombait depuis une demi-minute. Après une chute libre de 45 secondes, l’objet atteignit une altitude de 600 mètres, où ses capteurs déclenchèrent une explosion nucléaire. La réaction en chaîne produisit une énergie équivalente à 15 000 tonnes de TNT, se manifestant d’abord par un flash aveuglant, puis par une boule de feu de 300 mètres de large.

Destruction et conséquences

La boule de feu détruisit tout sur son passage, émettant une chaleur intense qui enflamma instantanément les matières organiques dans un rayon de 1,5 kilomètre. La vague de choc supersonique qui suivit acheva de dévaster la ville, créant un vide atmosphérique qui attisa les incendies. En quelques heures, Hiroshima fut consumée par une tempête de feu qui dura 24 heures.

Les pertes humaines

À la tombée de la nuit, 80 000 personnes avaient péri, y compris presque tous les travailleurs des coupe-feu. Dans les jours et mois suivants, des dizaines de milliers d’autres moururent du syndrome d’irradiation aiguë. À la fin de l’année, 140 000 personnes avaient succombé à des causes liées à la bombe, avec 74 000 morts supplémentaires à Nagasaki après le largage d’une seconde bombe atomique le 9 août.

Le témoignage d’Ōiwa Kōhei

Au moment de l’explosion, Ōiwa Kōhei vit un flash si intense qu’il crut que le Soleil était tombé sur Terre. La déflagration souffla les fenêtres de sa maison et le projeta contre un mur. Ce souvenir, gravé dans sa mémoire, témoigne de l’horreur vécue par les survivants de cette tragédie.

🔗 **Fuente:** [Nature](https://www.nature.com/articles/d41586-025-02460-7)